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EXAMEN PAR UN GROUPE SPÉCIAL BINATIONAL
CONSTITUÉ EN VERTU DE L’ARTICLE 1904
DE L’ACCORD DE LIBRE-ÉCHANGE NORD-AMÉRICAIN


DANS L’AFFAIRE

FILS MACHINE EN ACIER AU CARBONE ET CERTAINS FILS MACHINE
EN ACIER ALLIÉ DU CANADA :
DÉCISION DÉFINITIVE DE DOMMAGE
(1er NOV. 2002)

 

Dossier du Secrétariat
N° USA-CDA-2002-1904-09

 
MEMBRES DU GROUPE SPÉCIAL*:
  James R. Holbein, président
  Serge Anissimoff
  Kevin C. Kennedy
  David J. Mullan
  Robert E. Ruggeri
   

DÉCISION DU GROUPE SPÉCIAL

AVOCATS :
Pour Ivaco Inc. et Laminoirs Ivaco Inc. : Hunton & Williams (William Silverman et Richard P. Ferrin)
Pour les parties intéressées de la branche de production nationale : Collier Shannon Scott (Paul C. Rosenthal, Kathleen W. Cannon et R. Alan Luberda)
Pour l’autorité chargée de l’enquête : l’International Trade Commission des États-Unis, Bureau de l’avocat général (Karen Driscoll)
*  Les membres du groupe spécial tiennent à exprimer leur appréciation pour l’assistance reçue de leur adjoint Harj Mann.

I. INTRODUCTION

Le groupe spécial a été constitué en vertu du paragraphe 2 de l’article 1904 de l’Accord de libre-échange nord-américain (ALÉNA). Le groupe spécial a été chargé de la révision de la décision définitive sur le dommage prononcée par l’International Trade Commission des États-Unis (l’ITC ou la Commission) dans l’affaire intitulée Carbon and Certain Alloy Steel Wire Rod from Canada1.

Le 27 novembre 2002 le producteur canadien, exportateur et importateur aux États-Unis de la marchandise en cause, Ivaco Inc. et Laminoirs Ivaco Inc., (Ivaco), a déposé une demande de révision de cette décision par un groupe spécial.

Dans sa plainte, déposée le 9 décembre 2002, Ivaco expose ce qui suit :

L’ITC a refusé à tort de collecter des données sur les producteurs étrangers, les producteurs et les importateurs étasuniens et les acheteurs pour le dernier trimestre pour lequel elles étaient disponibles, soit le deuxième trimestre de 2002;

L’ITC a rejeté certains renseignements financiers relatifs à des producteurs étasuniens pour le deuxième trimestre de 2002 présentés par Ivaco au motif qu’ils avaient été présentés hors délai;

L’ITC a réduit à tort l’importance accordée au premier trimestre de 2002 « en raison de l’existence de ces enquêtes »; L’ITC a cumulé à tort les importations en provenance du Canada avec celles qui provenaient du Brésil, de l’Indonésie, du Mexique, de la Moldavie, de l’Ukraine et de la Trinité-et-Tobago;

L’ITC a conclu à tort que (i) le volume des importations et l’augmentation de ce volume, et (ii) le cassage des prix étaient « notables »; L’ITC a décidé à tort que les importations en cause cumulées « ont eu pour effet d’empêcher de façon notable des hausses de prix »;

L’ITC a conclu à tort que « les importations en cause ont un effet défavorable notable sur la branche de production nationale2 ».

Pour les motifs exposés ci-dessous et sur la base du dossier administratif, du droit applicable, des observations écrites des participants et de l’audience qu’il a tenue à Washington, D.C. le 14 mai 2004, le groupe spécial renvoie la décision définitive de l’ITC.

II. LE CONTEXTE

Le 31 août 2002, les producteurs étasuniens de fils machine en acier au carbone et de certains fils machine en acier allié ont déposé une requête auprès de l’ITC et du département du Commerce alléguant qu’ils subissaient un dommage important du fait des importations3 .

L’ITC a rendu une décision provisoire portant qu’il y avait « raisonnablement lieu de supposer » que la branche de production étasunienne subissait un dommage du fait des importations en provenance de l’Allemagne, du Brésil, du Canada, de l’Indonésie, du Mexique, de la Moldavie, de la Trinité-et-Tobago, de la Turquie et de l’Ukraine4 .

Le département du Commerce a ensuite conclu que les importations en provenance du Canada étaient subventionnées et vendues aux États-Unis à des prix inférieurs à leur juste valeur5.

Le 3 octobre 2002, l’ITC a décidé que les importations subventionnées en provenance du Brésil et du Canada et les importations à des prix inférieurs à leur juste valeur en provenance du Brésil, du Canada, de l’Indonésie, du Mexique, de la Moldavie, de la Trinité-et-Tobago et de l’Ukraine créaient un dommage important à la branche de production nationale6.

Le département du Commerce a ensuite prononcé des ordonnances imposant des droits compensateurs sur les importations en cause en provenance du Canada et du Brésil et des ordonnances imposant des droits antidumping sur les importations en cause en provenance du Canada, du Brésil, de l’Indonésie, du Mexique, de la Moldavie, de la Trinité-et-Tobago et de l’Ukraine7.

III. LE CRITÈRE D’EXAMEN

Toutes les parties conviennent que le critère d’examen applicable est défini aux paragraphes 2 et 3 de l’article 1904 de l’ALÉNA et à l’Annexe 1911 de l’ALÉNA. Le paragraphe 3 de l’article 1904 dispose que les groupes spéciaux procédant à un examen selon le chapitre 19 doivent appliquer :

les critères d’examen établis à l’annexe 1911, ainsi que les principes juridiques généraux qu’un tribunal de la Partie importatrice appliquerait à l’examen d’une détermination de l’organisme d’enquête compétent.

Ces dispositions exigent donc que le groupe spécial constitué en vertu du chapitre 19 applique le critère d’examen et « les principes juridiques généraux » qu’un tribunal fédéral aux États-Unis appliquerait à l’examen d’une décision sur le dommage de l’ITC8.

L’article 1911 définit le critère d’examen applicable à un examen par un groupe spécial comme « les critères énoncés à l’article 516A(b)(1)(B) du Tariff Act of 1930, modifié ». L’article 516A(b)(1)(B) définit en ces termes le critère de révision :

Le tribunal doit juger illégale toute décision, constatation ou conclusion dont il juge … qu’elle n’est pas étayée par une preuve substantielle dans le dossier ou que, pour quelque autre motif, elle n’est pas conforme à la loi.

 19 U.S.C. § 1516a(b)(1)(B). Aussi, le critère d’examen applicable à la présente procédure comprend-il le critère de la « preuve substantielle » exposé à l’article 516A(b)(1)(B) du Tariff Act of 1930, modifié (19 U.S.C. § 1516a(b)(1)(B)). Le groupe spécial doit donc confirmer la décision définitive de l’ITC « à moins que nous concluions que la décision ... n’est pas étayée par une preuve substantielle ou, pour quelque autre motif, n’est pas conforme à la loi ». PPG Industries, Inc. v. United States, 978 F.2d 1232, 1236 (Fed. Cir. 1992).

La Cour suprême des États-Unis a interprété la « preuve substantielle » de la manière suivante :

La preuve substantielle, c’est davantage que de simples indices; elle ne saurait se limiter à faire suspecter l’existence du fait à établir. « Cela veut dire qu’il doit y avoir une preuve pertinente qu’un esprit raisonnable pourrait considérer comme suffisante pour étayer une conclusion... » ... et elle doit être suffisante pour justifier, s’il s’agissait d’un procès devant jury, un refus d’ordonner un verdict si la conclusion à tirer était une conclusion de fait qu’il appartiendrait au jury d’apprécier9.

La Cour d’appel du circuit fédéral a appliqué la même interprétation de la « preuve substantielle » dans l’examen des décisions en matière de commerce international10.

En outre, la preuve substantielle « est un peu moins que la prépondérance de la preuve ». Consolo v. Federal Maritime Comm’n, 383 U.S. aux pages 619 et 620 (1966). « La possibilité de tirer deux conclusions incompatibles de la preuve n’empêche pas la conclusion d’un organisme administratif d’être étayée par une preuve substantielle. » Matsushita Electric Industrial Co., Ltd. v. United States, 750 F.2d à la page 933 (Fed. Cir. 1984) (citant Consolo v. Federal Maritime Commission, 383 U.S. aux pages 619 et 620); PPG Industries, Inc. v. United States, 978 F.2d à la page 1237 (Fed. Cir. 1992)11.

« Il n’appartient pas à la Cour d’apprécier la suffisance qualitative ou quantitative des preuves ni de rejeter une conclusion au motif d’une interprétation différente du dossier. » Koyo Seiko Co., Ltd. v. United States, 810 F. Supp. 1287, à la page 1289 (Ct. Int’l Trade 1993) (renvoyant à la décision Timken Co. v. United States, 699 F. Supp. 300, à la page 306 (1988)), confirmée par 894 F.2d 385 (Fed. Cir. 1990); Can-Am Corp. v. United States, 664 F. Supp. 1444, à la page 1450 (Ct. Int’l Trade 1987).

Le groupe spécial doit procéder à l’examen d’une décision définitive sur le dommage « sur la base du dossier administratif ». Paragraphe 2 de l’article 190412. Le groupe spécial ne doit donc pas réviser la décision de l’organisme de novo. Décisions Cabot Corp. v. United States, 694 F. Supp. 949, aux pages 952 et 953 (Ct. Int’l Trade 1988); Ceramica Regiomontana, S.A. v. United States, 636 F. Supp. 961, à la page 966 (Ct. Int’l Trade 1986), confirmée par 810 F.2d 1137 (Fed. Cir. 1987); Luciano Pisoni Fabbrica Accessori v. United States, 640 F. Supp. 255, à la page 256 (Ct. Int’l Trade 1986).

L’obligation d’examen « sur la base du dossier » signifie que cet examen par le groupe spécial doit être limité à la seule « information fournie à [l’ITC] ou obtenue par elle... au cours d’une procédure administrative... » 19 U.S.C. § 1516a(b)(2)(A)(i). Le groupe spécial ne saurait connaître d’informations qui n’ont pas été fournies à l’ITC, ou obtenues par elle, au cours de la procédure administrative.

Ni la Cour d’appel du circuit fédéral ni le Tribunal de commerce international (la CIT) « ne peuvent... substituer leur propre opinion à celle de [l’organisme administratif] lorsqu’il s’agit de choisir "entre deux vues relativement contradictoires, même si le tribunal aurait été justifié de faire un choix différent s’il avait été saisi de l’affaire de novo" ». Tehnoimportexport, UCF America Inc. v. United States, 783 F. Supp. 1401, à la page 1404 (Ct. Int’l Trade 1992) (renvoyant à Universal Camera Co. v. NLRB, 340 U.S. 474, à la page 488 (1951)); American Spring Wire Corp. v. United States, 590 F. Supp. 1273, à la page 1276 (Ct. Int’l Trade 1984), confirmée sous l’intitulé Armco, Inc. v. United States, 760 F.2d 249 (Fed. Cir. 1985). Aussi le groupe spécial est-il contraint aux mêmes limitations.

Mais cette déférence à l’égard de l’organisme administratif a ses limites. Comme l’a jugé la CIT :

[L]e critère de la preuve substantielle oblige en général les tribunaux judiciaires à s’en remettre aux modes d’enquête de l’organisme administratif et à ses constatations... [l]e Tribunal ne saurait autoriser un organisme administratif à exercer ce pouvoir discrétionnaire en ignorant ou en contrecarrant l’intention du législateur, exprimée dans les dispositions législatives matérielles que cet organisme est chargé d’appliquer... Si le pouvoir discrétionnaire de l’organisme administratif était illimité, la révision judiciaire (prescrite par la lo i) ici exercée n’aurait pas de raison d’être.

Armco, Inc. v. United States, 733 F. Supp. 1514, à la page 1519 (Ct. Int’l Trade 1990) (renvois omis); Cabot Corp. v. United States, 694 F. Supp. 949, 953 (Ct. Int’l Trade 1988) (et jurisprudence citée).

Le second élément du critère d’examen (si la décision est « conforme à la loi13 ») est applicable en matière d’interprétation de lois par l’organisme administratif. Article 516A(b)(1)(B) du Tariff Act of 1930, modifié, 19 U.S.C.A. § l516a(b)(1)(B).

Pour déterminer si l’interprétation du texte législatif par l’ITC est « conforme à la loi », le groupe spécial doit faire preuve de déférence à l’égard de l’interprétation raisonnable donnée par l’organisme administratif de la loi qu’il est chargé d’appliquer. « La Cour suprême enseigne que les tribunaux judiciaires doivent faire preuve de déférence à l’égard de l’interprétation par un organisme de la loi qu’il est chargé d’appliquer, pourvu que cette interprétation soit raisonnable. » PPG Industries, Inc. v. United States, 928 F.2d 1568, à la page 1571 (Fed. Cir. 1991)14. Voir aussi les arrêts Zenith Radio Corp. v. United States, 437 U.S. 443, aux pages 450 et 451 (1978); Georgetown Steel Corp. v. United States, 801 F.2d 1308, à la page 1318 (Fed. Cir. 1986); American Lamb Co. v. United States, 785 F.2d 994, à la page 1001 (Fed. Cir. 1986); Consumer Product Division, SCM Corp. v. Silver Reed America, Inc., 753 F.2d 1033, à la page 1039 (Fed. Cir. 1985); Smith Corona Group v. United States, 713 F.2d 1568, à la page 1571 (Fed. Cir. 1983), demande de certiorari refusée, 465 U.S. 1022 (1984)15. Cette déférence s’étend à l’interprétation, par l’autorité compétente, de sa propre réglementation16.

Conformément à ce principe de droit administratif, l’ITC a reçu un vaste pouvoir discrétionnaire pour l’application des lois sur les droits antidumping et sur les droits compensateurs. « Compte tenu de ce fait, le fardeau de la partie appelante en appel est lourd, car elle doit nous convaincre que l’interprétation... [de l’organisme] n’est effectivement pas permise par la loi. » Arrêt PPG Industries, Inc. v. United States, 928 F.2d à la p. 1571 (Fed. Cir. 1991)17 .

Néanmoins ce pouvoir discrétionnaire et cette déférence ne sont pas absolus : « La déférence traditionnelle dont font preuve les tribunaux judiciaires envers l’interprétation d’un organisme administratif ne saurait recevoir une application qui porte atteinte à l’intention, clairement exprimée, du législateur. » Décision Saudi Iron & Steel Co. (Hadeed) v. United States, 675 F. Supp. 1362, à la p. 1365 (Ct. Int’l Trade 1987).

Selon un principe fondamental et consacré du droit administratif des États-Unis, la décision d’un organisme administratif dans une procédure juridictionnelle doit s’appuyer sur une motivation, faisant apparaître de façon suffisamment claire les divers liens entre les constatations de fait de l’organisme, son raisonnement et sa conclusion. Comme l’a fait observer la Cour suprême des États-Unis dans l’arrêt Securities & Exchange Comm’n v. Chenery Corp. :

Si la décision administrative doit être révisée sur le fondement sur lequel elle prétend reposer, ce fondement doit être exposé avec une clarté suffisante pour qu’on puisse le comprendre. Il ne faut pas que le tribunal soit forcé de deviner la théorie sur laquelle se fonde la décision de l’organisme; on ne peut non plus attendre du tribunal qu’il élabore ce qui doit être précis à partir de ce que l’organisme a laissé vague et peu concluant. Autrement dit, « [n]ous devons savoir ce qu’une décision signifie avant qu’il nous incombe de dire si elle correcte ou non. »

332 U.S. 194, aux pages 196 et 197 (1947) (renvoyant à l’arrêt United States v. Chicago, M., St. P. & P.R. Co., 294 U.S. 499, à la page 511 (1935)). La Cour suprême a souligné ce point dans des arrêts ultérieurs. Voir les arrêts Burlington Truck Lines v. United States, 371 U.S. 156, aux pages 168 et 169 (1962) (« Les tribunaux ne doivent pas accepter les rationalisations post hoc des avocats au sujet de la décision de l’organisme; selon l’arrêt Chenery, il faut que l’ordonnance discrétionnaire de l’organisme soit confirmée, le cas échéant, sur le même fondement que celui que l’organisme a lui-même exprimé clairement dans l’ordonnance... ») Accord Elec. Consumers Res. Council v. F.E.R.C., 747 F.2d 1511, à la page 1513 (D.C. Cir 1984); SKF USA Inc. v. United States, 254 F.3d 1022, à la page 1028 (Fed. Cir. 2001); Rhodia Inc. v. United States, 185 F. Supp. 2d 1343 (Ct. Int'l Trade 2001); A. Hirsh, Inc. v. United States, 729 F. Supp. 1360, à la page 1362 (Ct. Int'l Trade 1990). Bref, il faut que le raisonnement de l’organisme administratif soit transparent avant qu’on puisse demander à un organe de révision d’examiner la décision de l’organisme. L’organisme qui ne satisfait pas à cette norme de motivation de la décision prive les parties de la possibilité d’obtenir une procédure équitable et transparente et rend impossible la tâche de l’organe d’examen.

IV. OPINION

A. La demande de données sur le deuxième trimestre de 2002

1. Le contexte factuel

Après la publication de la décision provisoire de dumping de l’ITA, le 2 mai 2002, l’ITC a fixé les délais pour la phase définitive de son enquête sur le dommage, notamment la présentation à la Commission des réponses aux questionnaires pour le 14 mai 200218. Les questionnaires demandaient aux parties de fournir les données trimestrielles jusqu’au premier trimestre de 2002.

Par la suite, l’ITA a reporté ses décisions définitives dans les enquêtes de dumping du 17 juin au 23 août 2002. Aussi, l’ITC a-t-elle révisé son calendrier, en date du 15 mai 2002, pour tenir compte du nouveau calendrier de l’ITA19. Le nouveau calendrier de l’ITC comprenait les délais suivants :

- le 14 août pour le rapport du personnel préalable à l’audience;

- le 21 août pour le dépôt des mémoires préalables à l’audience;

- le 27 août pour l’audience;

- le 4 septembre 2002 pour les mémoires postérieurs à l’audience20.

Le 19 juin 2002, Ivaco et d’autres défenderesses ont demandé à l’ITC de collecter les données sur le deuxième trimestre de 200221. Ivaco fondait sa demande notamment sur la fin de la récession de 2001 et l’effet du programme de droits de sauvegarde établi en vertu de l’article 201 sur les fils machine en acier. Plusieurs semaines plus tard, le 1er août 2002, Ivaco a réitéré sa demande22. L’ITC n’a pas établi de questionnaires pour les données du deuxième trimestre et Ivaco a mentionné la demande à nouveau dans son mémoire postérieur à l’audience le 5 septembre 200223 . Le 23 septembre 2002, Ivaco, avec d’autres défenderesses, a présenté une autre demande à l’ITC en vue de la collecte des données du deuxième trimestre24. Enfin, Ivaco a réitéré sa demande de collecte des données dans ses dernières observations25. L’ITC n’a jamais collecté les données du deuxième trimestre ni répondu aux nombreuses demandes formulées par Ivaco et les autres défenderesses.

2. L’analyse du dommage au présent

Ivaco prétend que la décision de l’ITC de ne pas collecter les données plus récentes du deuxième trimestre était arbitraire et capricieuse notamment parce que l’ITC avait l’obligation de décider du dommage « au présent ». Le groupe spécial n’est pas disposé à accepter cette position.

Le Titre VII est muet au sujet de la tranche de temps que doit couvrir la période d’enquête de l’ITC. Ivaco fait valoir que la loi parle de la question de savoir si une branche de production nationale « subit un dommage important » comme fondement pour exiger les données les plus actuelles pour décider du dommage au présent26. Le groupe spécial n’est pas convaincu que la formulation législative en cause exprime une telle règle. La CIT, dans la décision Kenda Rubber, est arrivée à la même conclusion que « la formulation de la loi au présent » n’oblige pas l’ITC à étudier la « période actuelle »27.

En revanche, il est bien établi que le silence de la loi à cet égard exprime le pouvoir discrétionnaire considérable dont jouit l’ITC pour déterminer la période d’enquête. Voir, p. ex., la décision America Spring Wire Corp. v. United States, 8 CIT 20, à la page 26, 590 F. Supp. 1273, à la page 1279 (1984), confirmée sous l’intitulé Armco, Inc. v. United States, 760 F.2d 249 (Fed. Cir. 1985) (« Mais l’ITC n’est pas tenue par la loi de retenir une tranche de temps particulière pour son analyse, bien qu’elle retienne en règle générale des périodes annuelles… On peut difficilement y voir l’obligation de procéder à une analyse trimestrielle sur demande des requérantes. »). Dans cette affaire, la CIT a confirmé l’utilisation qu’avait faite l’ITC de données annuelles et a refusé d’obliger l’ITC à utiliser quelques données trimestrielles que ce soit28 .

Ivaco invoque les décisions de la CIT dans les affaires Usinor v. United States, Ct. No. 01-00010, Slip Op. 02-70 (Ct. Int’l. Trade, 19 juillet 2002) et Chr. Bjelland Seafoods A/C v. United States, 19 CIT 35 (1992) (Saumon norvégien II), au soutien de sa position que l’ITC est tenue d’obtenir les données les plus récentes qui sont disponibles jusqu’au jour du vote de la Commission. Toutefois, ces deux affaires doivent être distinguées de la présente affaire, parce que ni l’une ni l’autre de ces deux affaires ne supposait l’ajout de données au dossier de l’organisme, comme Ivaco cherche à l’obtenir ici. La question qui se posait dans ces deux affaires n’était pas de savoir si l’ITC était tenue de prolonger sa période d’enquête, mais plutôt de savoir s’il fallait prendre en compte certaines données faisant déjà partie du dossier dont elle était saisie.

Dans la première affaire du Saumon norvégien29, la CIT a jugé que « la tâche de la Commission est de déterminer si les importations en cause causent un dommage "actuel" à la branche de production nationale ». Le Tribunal a jugé que l’ITC avait incorrectement fondé sa décision quant à l’existence d’un dommage important « actuel » en mars 1991 sur les « effets persistants » du dommage passé, survenu en 1989. L’ITC avait accordé une « grande importance » aux données de la période de 1987 à 1989 et accordé « moins de poids » aux données de la période 1990 et 1991 au cours de laquelle la requête avait été déposée et les droits provisoires avaient été imposés.

Sur le renvoi, l’ITC a refusé d’accorder aux données postérieures à juin 1990 « la moindre valeur probante ». Dans l’affaire du Saumon norvégien II, la CIT a encore infirmé la décision de l’ITC, en relevant que « des éléments de preuve postérieurs dans le dossier dont la majorité des membres de l’ITC n’a pas traité réfutent simplement toutes les déductions que les importations en cause constituent une cause "actuelle" de [dommage]… En d’autres termes, l’ITC ne peut fonder une décision positive quant à l’existence d’un dommage important actuel seulement sur des éléments de preuve antérieurs dans le dossier établissant que les importations causent un dommage dans le cas où, comme en l’espèce, les éléments de preuves fiables les plus récents dans le dossier démontrent que, par suite du changement de circonstances, les importations en cause ne sont plus une cause d’un tel dommage. » Chr. Bjelland Seafoods A/C v. United States, 19 CIT 35, aux pages 43, 44 et 47 (1992) (non souligné dans l’original).

Donc, dans les affaires du Saumon, la question posée était de savoir si l’ITC aurait dû considérer et apprécier, et dans quelle mesure, des éléments de preuve déjà dans le dossier, non pas si elle aurait dû admettre de tels éléments de preuve dans le dossier.

Dans la décision Usinor, la question n’était pas non plus de savoir si l’ITC était tenue de collecter des données pour le dossier ou d’admettre certaines données dans le dossier, mais plutôt de savoir si elle devait traiter des « éléments de preuve pertinents à des égards importants faisant régulièrement partie du dossier » qui avaient déjà été collectés. Usinor v. United States, Ct. No. 01- 00010, Slip Op. 02-70 à la page 20 (Ct. Int’l. Trade, 19 juillet 2002). L’ITC avait voulu limiter son examen aux chiffres sur l’utilisation de la capacité allant de 1997 à mars 2000. Les défenderesses voulaient que l’ITC examine les données des trois derniers trimestres de 2000 qui faisaient déjà partie du dossier. Le Tribunal a fait observer : « La Commission doit traiter des éléments de preuve au dossier sur les circonstances et les événements significatifs qui surviennent entre la date de la requête et le jour du vote… Une décision sur l’effet discernable dans cette affaire ne peut être prise que si les éléments de preuve pertinents à des égards importants faisant régulièrement partie du dossier sont traités. » Id. Donc, la situation se distingue de celle de la présente espèce, où Ivaco cherche à faire ajouter certaines données au dossier de l’organisme.

La CIT a traité de façon approfondie, dans l’affaire Saumon norvégien II, des limites de l’obligation de l’ITC de se concentrer sur les données les plus proches possible du jour du vote. « [L]’ITC est tenue de tenir compte des éléments de preuve fiables au dossier au sujet de changements de circonstances survenant entre la date de la requête et le jour du vote et qui ont une incidence sur l’enquête au sujet du dommage important actuel. » Cela étant dit, le Tribunal a fait observer que i) « [l’]ITC n’est pas tenue de collecter et d’examiner les données jusqu’au jour du vote… sans considérer si la fiabilité de ces données est suspecte »; et ii) l’ITC n’est pas « tenue de fonder sa décision quant à l’existence d’un dommage important actuel sur des déductions au sujet d’une période la plus proche possible du jour du vote, au sujet de laquelle on ne peut, en pratique, collecter de données. » Id. à la page 43, note 22.

Le Tribunal a dit clairement qu’« il faut évaluer le dossier tout entier », mais que, dans ce dossier, l’ITC doit traiter des données qui sont les plus proches possible du jour du vote pour autant qu’elles soient fiables. L’ITC conserve toujours le pouvoir discrétionnaire de choisir la tranche de temps la plus appropriée comme période d’enquête. « Le Tribunal fait simplement observer que, dans la tranche de temps retenue par l’ITC pour son enquête, les renseignements relativement anciens servent à fournir un cadre de référence historique par rapport auquel il faut prendre une décision quant à l’existence d’un dommage important « actuel » (c’est-à-dire aussi proche que possible du jour du vote, compte tenu des limitations des données collectées). » Id.

La CIT est revenue sur cette question dans la décision Saarstahl AG v. United States, 858 F. Supp. 196, à la page 200 (CIT 1994) et a statué que la décision Saumon norvégien n’« oblige » pas l’ITC à fonder sa décision quant à l’existence du dommage sur l’état de la branche de production nationale « au jour du vote ». Elle a dit : « le Tribunal interprète la décision Saumon norvégien comme préconisant l’utilisation de renseignements concernant la branche de production nationale dans une tranche de temps la plus proche possible. La recherche de renseignements à jour, toutefois, ne doit pas avoir pour contrepartie qu’on néglige la "possibilité que des effets négatifs d’un dommage actuel soient latents". C’est pour cette raison que le Tribunal fait normalement preuve de déférence à l’égard du pouvoir discrétionnaire de la Commission dans le choix de la période la plus appropriée pour son enquête. » Id. à la page 200 (renvois omis).

Compte tenu de tout cela, le groupe spécial ne peut conclure que l’ITC a abusé de son pouvoir discrétionnaire en fixant la période d’enquête. La fixatio n de la période d’enquête entre manifestement dans l’exercice du pouvoir discrétionnaire de l’ITC. On n’a pas présenté au groupe spécial, et le groupe n’a pas non plus trouvé, d’affaires dans lesquelles un tribunal de révision a obligé l’ITC à prolonger la période d’enquête ou à générer de nouvelles données dans le dossier. Certes, la Commission a bien le pouvoir et la latitude de rouvrir le dossier administratif en réponse à une décision de renvoi30 , mais ce n’est pas la question qui se pose à ce stade-ci de la procédure.

3. La nécessaire motivation de la décision

Il faut toutefois établir une distinction entre le pouvoir discrétionnaire de la Commission de fixer la période d’enquête et son obligation légale de répondre avec une motivation aux demandes qui soulèvent des questions importantes pour l’enquête. Ivaco a plaidé que la Commission n’a pas fourni de réponse motivée à ses demandes répétées de prolonger la période et d’établir des questionnaires pour le deuxième trimestre de 2002. Le dossier indique bien qu’Ivaco (et les autres défenderesses) ont soulevé la question des questionnaires sur le deuxième trimestre de 2002 à quatre occasions au cours de l’enquête. L’ITC n’a pas répondu à ces demandes au cours de l’enquête, ni fourni d’explication dans le dossier sur les raisons pour lesquelles elle n’a pas cherché à obtenir de données sur le deuxième trimestre.

Dans la mesure où Ivaco renvoie à des éléments de preuve et présente des arguments pertinents au sujet du volume des importations, de leurs effets sur les prix et de leur incidence, l’article 19 U.S.C. § 1677f(i)(3)(B) impose à la Commission l’obligation d’« expliquer » le fondement de sa décision par rapport aux arguments en sens contraire présentés par Ivaco. Cette conclusion est étayée par les travaux préparatoires dans lesquels on trouve l’extrait suivant au sujet de l’article 19 U.S.C. § 1677f(i)(3)(B) :

Le droit existant n’exige pas qu’un organisme réponde expressément à chaque argument présenté par une partie, mais prévoit plutôt que les questions importantes par rapport à la décision de l’organisme soient traitées de sorte que le « cheminement de l’organisme puisse être raisonnablement discerné » par un tribunal de révision.

Uruguay Round Trade Agreements, Statement of Administrative Action, H.R. Doc. No. 316, vol. 1, 103d Cong., 2d Sess. 892 (1994)(SAA). Voir l’arrêt Taiwan Semiconductor Indus. Assoc. v. United States, 266 F.3d 1339, à la page 1345 (Fed. Cir. 2001) (« la Commission n’a pas à isoler le dommage causé par les importations déloyales … mais doit examiner les autres facteurs pour éviter d’attribuer aux importations en cause le dommage provenant d’autres sources. ») 31

L’ITC avance pour la première fois, dans son mémoire présenté au groupe spécial et à l’audience, que le prolongement de la période d’enquête aurait été difficile pour des raisons administratives, étant donné le nombre de parties avec lesquelles il fallait communiquer et le volume de données à compiler et à analyser. L’avocat de l’ITC indique également que l’ITC n’avait pas suffisamment de temps pour collecter et traiter les données demandées par Ivaco et pour effectuer le suivi qui aurait probablement été nécessaire32.

Il se peut que la décision de la Commission de ne pas collecter de données pour le deuxième trimestre de 2002 ait constitué un exercice légitime de son pouvoir discrétionnaire. Néanmoins, puisque la Commission n’a pas répondu aux demandes d’Ivaco dans le dossier ni traité de celles-ci, le raisonnement de la Commission au soutien de sa décision de ne pas collecter les données du deuxième trimestre de 2002 manque de transparence et demande davantage d’explication. Burlington Truck Lines v. United States, 371 U.S. 156, aux pages 168 et 169 (1962) (« Les tribunaux ne doivent pas accepter les rationalisations post hoc des avocats en appel au sujet de la décision de l’organisme; selon l’arrêt Chenery, il faut que l’ordonnance discrétionnaire de l’organisme soit confirmée, le cas échéant, sur le même fondement que celui que l’organisme a lui-même exprimé clairement dans l’ordonnance... ») Accord Elec. Consumers Res. Council v. F.E.R.C., 747 F.2d 1511, à la page 1513 (D.C. Cir 1984); SKF USA Inc. v. United States, 254 F.3d 1022, à la page 1028 (Fed. Cir. 2001) (« nous refusons généralement de considérer la nouvelle justification que l’organisme donne de sa décision »); Rhodia Inc. v. United States, 185 F. Supp. 2d 1343 (Ct. Int'l Trade 2001) (« Bien que le mémoire du département du Commerce traite de façon plus détaillée des raisons pour lesquelles les producteurs intégrés ont généralement des coûts indirects plus élevés, les « rationalisations post hoc des avocats [ne peuvent] compléter ou supplanter la justification ou le raisonnement de l’organisme. »); A. Hirsh, Inc. v. United States, 729 F. Supp. 1360, à la page 1362 (Ct. Int'l Trade 1990) (« bien que l’ITC dispose d’une grande latitude pour les décisions dans ce domaine, elle n’est pas dispensée d’exprimer clairement son raisonnement. » ).

L’organisme qui ne satisfait pas à cette norme de motivation de la décision prive les parties de la possibilité d’obtenir une procédure équitable et transparente et rend impossible la tâche de l’organe d’examen. Si elle ne dispose pas d’un exposé adéquat des vues de la Commission sur la question, la plaignante ne peut s’être fait entendre en justice, comme l’exigent l’arrêt Chenery et les arrêts similaires. Le groupe spécial conclut que le défaut de la Commission d’exposer sa position sur la collecte de données concernant le deuxième trimestre de 2002 dans la motivation de sa décision était arbitraire, capricieux et non conforme à la loi. Le groupe spécial renvoie cette question à la Commission pour que celle-ci fournisse les motifs pour lesquels elle n’a pas collecté les données du deuxième trimestre de 2002, comme le demandait la plaignante.

B. Réduction de l’importance accordée aux données du premier trimestre de 2002

1. Introduction

Ivaco prétend que la Commission a décidé à tort de réduire l’importance accordée aux données du premier trimestre de 2002 en raison de l’existence de l’enquête. Lorsqu’elle examine si le changement des données est lié à l’existence de l’enquête, la Commission peut simplement le présumer dès lors qu’elle constate un « changement notable33 ». Certes, elle peut choisir de ne pas réduire l’importance accordée aux données, mais elle possède le pouvoir discrétionnaire de le faire.

La procédure légale selon laquelle la Commission arrive à la conclusion que le changement des données est lié à l’existence de l’enquête est donc relativement simple. Elle exige seulement une constatation par la Commission qu’il y a eu un changement notable. Le lien entre le changement des données et l’existence de l’enquête peut ensuite être présumé.

Élément important, la présomption peut être renversée par une preuve établissant que le changement est lié à d’autres facteurs. Ivaco plaide qu’elle a présenté suffisamment d’éléments de preuve pour réfuter la présomption. La question que doit trancher le groupe spécial porte sur le point de savoir si la décision de la Commission de réduire l’importance du premier trimestre de 2002 (les données du premier trimestre) est étayée par une preuve substantielle et conforme à la loi.

2. Le cadre légal

Le point de départ de l’analyse est la loi qui autorise la Commission à réduire l’importance de données. L’article 19 U.S.C. § 1677(7)(I) dispose :

La Commission doit considérer si un changement du volume des importations de la marchandise en cause, de leurs effets sur les prix ou de leur incidence depuis le dépôt de la requête dans une enquête effectuée selon la Partie I ou la Partie II du présent sous-titre est lié à l’existence de l’enquête et, dans ce cas, la Commission peut réduire l’importance accordée aux données de la période suivant le dépôt de la requête pour prendre sa décision au sujet de l’existence du dommage important, de la menace de dommage important ou du retard important subi pour créer une branche de production aux États-Unis.

Le SAA fournit une explication de l’intention du législateur dans l’article 19 U.S.C. § 1677(7)(I) et modifie la condition préalable traitée ci-dessus :

[L]orsqu’elle trouve dans le dossier des éléments de preuve d’un changement notable des données concernant les importations ou leurs effets après le dépôt de la requête… la Commission peut présumer que ce changement est lié à l’existence de l’enquête. En l’absence d’éléments de preuve suffisants qui renversent la présomption et établissent que le changement est lié à des facteurs autres que l’existence de l’enquête, la Commission peut réduire l’importance à accorder aux données touchées.

SAA aux pages 853 et 854.

Dans ce contexte, une autre disposition pertinente est l’article 19 U.S.C. § 1677f(i)(3)(B), qui dispose :

[L]a Commission doit donner dans sa décision définitive sur l’existence du dommage une explication du fondement de cette décision qui traite des arguments pertinents formulés par les parties intéressées qui sont parties à l’enquête ou à l’examen (selon le cas) en ce qui a trait au volume des importations de la marchandise en cause, à leurs effets sur les prix et à leur incidence sur la branche de production.

Ainsi qu’il a été indiqué dans la Partie IV A ci-dessus, l’article 19 U.S.C. § 1677f(i)(3)(B) impose à la Commission l’obligation d’« expliquer » le fondement de sa décision de réduire l’importance des données du premier trimestre malgré les éléments de preuve et les arguments « pertinents » en sens contraire présentés par Ivaco. La question de la réduction de l’importance des données du premier trimestre est manifestement importante dans la présente affaire, étant donné les arguments d’Ivaco au sujet des changements de volume, d’effets sur les prix et d’incidence au cours de 2002, et dans le contexte des autres observations analogues d’Ivaco concernant sa demande de collecter les données du deuxième trimestre de 2002 traitée dans la section précédente. À notre avis, il est manifeste que la Commission n’a pas traité les diverses observations d’Ivaco tendant à renverser la présomption. On ne trouve tout simplement aucune analyse des arguments d’Ivaco et aucune évaluation de leur suffisance pour renverser la présomption dans la décision définitive.

3. Les arguments des parties et la décision définitive de la Commission

a. Les arguments d’Ivaco

Ivaco expose qu’elle a présenté à l’ITC des éléments de preuve et un argument qui renversaient la présomption que le changement de volume des importations en cause dans le premier trimestre de 2002 était lié à l’existence de l’enquête34. Selon son argument, l’amélioration de la branche de production nationale n’était pas liée à l’existence de l’enquête, mais à d’autres facteurs. Il s’agit là d’une question on ne peut plus pertinente et importante, puisque toutes les parties conviennent que la branche de production nationale a connu une amélioration dans le premier trimestre de 200235.

En particulier, Ivaco énumère les facteurs suivants qui renverseraient la présomption :

1 Le volume des importations en cause est resté stable après le dépôt de la requête et n’a diminué que beaucoup plus tard, en raison du contingent tarifaire établi en vertu de l’article 201 qui avait été nouvellement révisé; selon ce contingent tarifaire, les volumes résiduels d’importations dans les limites du contingent ont été permis en janvier et en février mais n’ont pas été compensés par les pointes historiques de volume en mars;

2 La situation de la branche de production nationale s’est améliorée malgré une augmentation des importations totales au cours du trimestre;

3 La branche de production nationale a connu une amélioration des ratios de rentabilité et de productivité en raison de la restructuration et de réductions des coûts de production, ainsi que d’autres facteurs;

4 Les effets de la récession de 2000 à 2001, et particulièrement les effets de la « fin de la récession »;

5 Les augmentations de volume des importations en cause sur la période d’enquête se rapportaient à des marchés qui avaient été abandonnés par la branche de production nationale, laquelle a quitté le marché au cours de la période d’enquête pour des raisons sans rapport avec les importations en cause;

6 Les prix intérieurs ont augmenté (de trois à six mois) avant que l’enquête ne soit en cours, sur la base d’éléments de preuve dans le dossier.

On trouve dans le dossier d’abondants éléments de preuve indiquant qu’Ivaco a soulevé clairement et présenté sans ambiguïté ces arguments devant la Commission. À titre d’illustration, on peut donner les renvois suivants :

- S’agissant en particulier du volume, les pages 57 à 60 du Mémoire préalable à l’audience conjoint des défenderesses soutiennent que « [l]a Commission ne devrait pas réduire l’importance accordée à la situation actuelle de la branche de production en raison du dépôt de la requête ».

- À la page 57, le Mémoire préalable à l’audience conjoint des défenderesses fait valoir que le volume des importations en cause a augmenté au lieu de diminuer, en renvoyant à des éléments de preuve présentés dans les rapports du personnel, et insiste vivement pour qu’on interprète l’article 19 U.S.C. § 1677(7)(I) concernant les « importations totales » de la marchandise en cause. Ivaco soulève une distinction importante entre les « importations de la marchandise en cause » et les « importations de la marchandise en cause par les producteurs en cause ».

- Aux pages 25, 32 et 50 à 58, le Mémoire préalable à l’audience conjoint des défenderesses explique encore que la restructuration de la branche de production et les changements au contingent tarifaire établi en vertu de l’article 201 en novembre 2001, et non l’existence de l’enquête, ont causé la diminution du volume d’importations pendant le premier trimestre de 2002 (comme le veut l’interprétation de la Commission). À la page 20, le Mémoire préalable à l’audience conjoint des défenderesses renvoie encore aux effets de la récession en 2000 et 2001.

- Aux pages 28 à 32, le Mémoire préalable à l’audience conjoint des défenderesses dit que les augmentations de volume des importations en cause sur la période d’enquête étaient liées à des marchés qui avaient été abandonnés par les producteurs nationaux et que ceux-ci avaient quitté le marché au cours de la période d’enquête pour des raisons sans rapport avec les importations en cause, en s’appuyant sur des éléments de preuve précis dans le dossier.

- Les pages 41 à 47 et la pièce 14 du Mémoire préalable à l’audience conjoint des défenderesses renvoient à des éléments de preuve dans le dossier et font valoir que les prix intérieurs ont augmenté avant le dépôt de la requête et, donc, avant que l’enquête ne soit en cours.

- Dans son Mémoire postérieur à l’audience, aux pages 8 à 10, Ivaco indique des éléments de preuve dans le dossier pour renverser la présomption que les changements de données étaient causés par l’existence de l’enquête et offre d’autres explications en sens contraire des changements de volume des importations, de leurs effets sur les prix et de leur incidence pendant la période d’enquête.

- Dans l’Annexe à son Mémoire postérieur à l’audience, Ivaco fournit également des « Réponses aux questions de la Commission ». À la page A-8 de ces réponses, Ivaco présente une réponse à la question de la commissaire Hillman concernant « l’amélioration de la branche de production nationale malgré l’incidence des importations autres que les importations en cause ». La réponse d’Ivaco indique des éléments de preuve concernant une augmentation subite du volume d’importations en provenance de l’Inde, du Bélarus et de la République tchèque ainsi que les effets sur les prix et l’incidence sur les producteurs nationaux qui en résultaient.

- Les pièces 1 et 3 du Mémoire postérieur à l’audience d’Ivaco fournissent également des graphiques et des tableaux reprenant la preuve, au soutien de ses propres explications des changements de volume des importations, de leurs effets sur les prix et de leur incidence pendant que l’enquête était en cours.

b. La décision définitive de la Commission

Sans traiter expressément les arguments d’Ivaco, la Commission a décidé que la diminution du volume des importations en cause cumulées était causée par l’existence de l’enquête. La Commission n’a exercé son pouvoir discrétionnaire que sur ce fondement, semblet- il, pour réduire l’importance accordée aux données postérieures à la requête ou de façon précise aux données du premier trimestre en disant36 :

Nous avons examiné si le volume des importations en cause cumulées depuis le dépôt de la requête est lié à l’existence des enquêtes. Nous avons décidé qu’il en était ainsi dans le cas des volumes des importations en cause qui étaient moindres au cours de la période intermédiaire de 2002 qu’au cours de la période intermédiaire de 2001. Donc, nous réduisons l’importance accordée aux données intermédiaires de 2002 pour les besoins de nos décisions sur le dommage important. Les défenderesses ont plaidé que nous devrions concentrer notre analyse sur la situation actuelle de la branche de production, en raison des changements récents dans la branche de production nationale. Mémoire préalable à l’audience conjoint des défenderesses, aux pages 49 à 51. Nous avons considéré la totalité de la période examinée pour effectuer notre analyse, conformément à notre pratique habituelle, sauf dans l’exception indiquée pour les données intermédiaires de 2002. (Opinion de la Commission, note 167, à la page 27 des « Vues de la Commission », datées du 18 octobre 2002)

* * * *

En raison de l’existence de ces enquêtes et de la baisse du volume des importations en cause dans la période intermédiaire de 2002, nous jugeons que les données de la période 1999 à 2001 sont plus probantes pour notre analyse des prix et nous avons réduit l’importance accordée aux données intermédiaires de 2002. (Opinion de la Commission, note 177, à la page 28 des « Vues de la Commission », datées du 18 octobre 2002)

* * * *

Comme dans les sections sur le volume et les prix, nous avons concentré notre analyse sur les données des années civiles de 1999 à 2001 et réduit l’importance accordée aux données intermédiaires de 2002 en raison de l’effet du dépôt de la requête et de l’existence de ces enquêtes. (Opinion de la Commission, note 195, à la page 31 des « Vues de la Commission », datées du 18 octobre 2002)

* * * *

c. Les arguments de la Commission et des parties intéressées nationales

Par la force des choses, l’ITC et les parties intéressées nationales ont répondu assez bien et en détail aux arguments d’Ivaco en proposant une analyse et des motifs post hoc allant à l’encontre de la position d’Ivaco. Ces observations visaient d’une part à miner ou à contester la validité des arguments d’Ivaco. D’autre part, elles visaient à soutenir la décision de la Commission de réduire l’importance de certaines données en signalant des extraits de la décision définitive traitant de la restructuration et de la récession, des importations autres que les importations en cause, des prix et de l’amélioration de la branche de production nationale, c’està- dire les points mêmes que la Commission, selon les allégations d’Ivaco, n’avait pas traités.

Sans faire de constatation de fait, le groupe spécial note que les seuls extraits ou parties de la décision définitive qui traitent de la décision de la Commission de réduire l’importance accordée aux données du premier trimestre sont ceux qui ont été indiqués dans la Partie IV.B.3.b, soit les notes 167, 177 et 195 de la décision définitive de la Commission.

En outre, aucun des extraits de la décision définitive auxquels renvoient l’ITC ou les parties intéressées nationales ne mentionne expressément la décision de réduire l’importance accordée aux données du premier trimestre. Ces extraits n’ont de pertinence et de rapport qu’à l’égard de la décision de la Commission concluant à l’existence du dommage, et non de la décision de réduire l’importance accordée aux données du premier trimestre.

À cet égard, le groupe spécial n’entend d’aucune façon critiquer les parties pour leur argumentation et leurs observations, au demeurant fort valables. Le fait est qu’il incombe à la Commission, en fin de compte, d’analyser et d’expliquer ces questions. Le groupe spécial est d’avis que c’est la Commission en premier lieu qui doit traiter de la validité des arguments d’Ivaco. Les rationalisations post hoc des avocats ne sauraient remplacer la motivation établie par l’organisme chargé d’appliquer la loi. À cet égard, la Cour suprême des États-Unis, dans l’arrêt Burlington Truck Lines v. United States, 371 U.S. 156 (1962), a prévenu les organes de révision de ne pas accepter les rationalisations post hoc des avocats lorsqu’ils examinent les décisions d’organismes administratifs :

Les tribunaux ne doivent pas accepter les rationalisations post hoc des avocats en appel au sujet de la décision de l’organisme; [selon l’arrêt Securities & Exchange Comm'n v. Chenery Corp., 332 U.S. 194 (1947)], il faut que l’ordonnance discrétionnaire de l’organisme soit confirmée, le cas échéant, sur le même fondement que celui que l’organisme a lui-même exprimé clairement dans l’ordonnance... Il est incompatible avec le fonctionnement ordonné de la procédure de contrôle que les tribunaux judiciaires substituent leur propre pouvoir discrétionnaire ou celui des avocats à celui de la Commission. Il ne s’agit pas de désapprouver la procédure administrative… mais d’en prendre la défense.

Ainsi que la Cour suprême des États-Unis l’a dit dans l’arrêt Securities & Exchange Comm'n v. Chenery Corp., 332 U.S. 194 (1947) : [

N]ous avons souligné une règle simple, mais fondamentale, du droit administratif, à savoir qu’un tribunal de révision, lorsqu’il examine une décision que l’organisme administratif est seul autorisé à prendre, ne doit juger de son bien-fondé qu’en fonction des motifs invoqués par l’organisme. Si ces motifs sont inadéquats ou mal fondés, le tribunal n’a pas le pouvoir de confirmer la décision administrative en substituant ce qu’il considère comme un fondement plus adéquat ou mieux fondé. S’il le faisait, le tribunal serait entraîné dans un domaine que le législateur a réservé exclusivement à l’organisme administratif.

332 U.S., à la page 196. Enfin, comme l’a fait observer à cet égard le Tribunal de commerce international dans la décision A. Hirsh, Inc. v. United States, 729 F. Supp. 1360 (Ct. Int'l Trade 1990) :

Il est maintenant établi que toute décision susceptible de révision doit être motivée... [renvois omis] L’auteur de la décision, « en ne fournissant pas au tribunal le fondement de sa décision, empêche celui-ci de s’acquitter de son obligation légale en révision ». Industrial Fasteners Group v. United States, 2 CIT 181, à la page 190, 525 F. Supp. 885, à la page 893 (1981), confirmée par 710 F.2d 1576 (Fed.Cir. 1983). Selon cette norme, l’ITC dispose d’une grande latitude pour ses décisions dans ce domaine, mais elle n’est pas dispensée d’exprimer clairement son raisonnement. « De nombreux choix de l’ITC font appel à des considérations d’ordre "discrétionnaire", mais les choix doivent généralement être expliqués de sorte que le tribunal de révision puisse discerner le cheminement qui a conduit au résultat final. » Asociacion Colombiana de Exportadores de Flores v. United States, 12 CIT 1174, 704 F. Supp. 1068, à la page 1071 (1988)...
En l’espèce, l’ITC n’a pas exprimé clairement les motifs de son application particulière de la loi; elle a simplement cité le texte de la loi qui n’apprend rien. Sans une énonciation claire des motifs, le Tribunal ne peut apprécier si la décision de l’ITC était arbitraire, capricieuse ou d’une autre manière non conforme à la loi.

729 F. Supp. à la page 1362.

De même, dans la présente affaire, sans la motivation par la Commission de son rejet des éléments de preuve présentés par Ivaco pour renverser la présomption concernant l’importance à accorder aux données postérieures à la requête, le groupe spécial ne peut juger si la décision de la Commission est arbitraire, capricieuse ou d’une autre manière non conforme à la loi. Le dilemme auquel fait face le groupe spécial peut être illustré par les observations au sujet des changements du contingent tarifaire établi en vertu de l’article 201. L’avocat de l’ITC répond aux arguments d’Ivaco exposés ci-dessus au sujet du contingent tarifaire établi en vertu de l’article 201, à la note 62, page 52 de son mémoire, de la façon suivante :

La seule explication proposée à la Commission par Ivaco et par les autres défenderesses, quant à la baisse du volume des importations en cause dans la période intermédiaire de 2002, était l’entrée en vigueur du contingent tarifaire sur les fils machine établi en vertu de l’article 201… Cela est illogique parce que cet événement devait probablement toucher les données intermédiaires de 2001 sur le volume, que la Commission, conformément à sa pratique ordinaire, a comparées aux données de 2002. L’année 1 du contingent allait du 1er mars 2000 au 28 février 2001. L’année 2 du contingent allait du 1er mars 2001 au 28 février 2002.

Le problème auquel se heurte le groupe spécial peut maintenant être illustré de la manière suivante. Pour commencer, on ne trouve nulle part dans la décision définitive de la Commission de mention expresse de l’argument d’Ivaco au sujet des changements du contingent tarifaire établi en vertu de l’article 201.

Ensuite, cette explication post hoc ne tient pas compte de l’effet du changement du contingent tarifaire établi en vertu de l’article 201, le 21 novembre 2001, changement qui était mentionné et expliqué dans le Mémoire préalable à l’audience conjoint des défenderesses aux pages 25, 32 à 34, 52 à 54 et 58 et semblerait expliquer pourquoi la « pointe » historique de mars n’aurait pas été présente en 2002, mais l’était en 2001.

Enfin, l’ITC dit que le changement du contingent tarifaire établi en vertu de l’article 201 est le « seul facteur mentionné par Ivaco pour expliquer la baisse du volume des importations en cause dans la période intermédiaire de 2002 », ce qui ne tient pas compte des nombreux arguments présentés par Ivaco et rappelés ci-dessus au sujet des effets sur les prix et de l’incidence, qui contredisent également la présomption, retenue par la Commission, que les changements résultent de l’existence de l’enquête. Le groupe spécial est d’avis que la Commission doit expliquer le fondement de sa décision portant que les changements de volume, de prix et d’incidence ont été causés par l’existence de l’enquête en regard des observations en sens contraire d’Ivaco. La Commission n’est pas dispensée de l’obligation légale de traiter des arguments et des éléments de preuve pertinents présentés par Ivaco, qui cherchent à renverser la présomption à la fois pour le volume, les effets sur les prix et l’incidence.

4. Conclusion

En conclusion, on a présenté au groupe spécial des arguments sérieux sur les questions exposées ci-dessus ayant trait au bien-fondé de la décision de l’ITC de réduire l’importance de certaines données. Il convient de le rappeler, les arguments d’Ivaco ont été présentés en premier lieu devant la Commission. Ces arguments ne sont toujours pas traités ouvertement. De plus, le dossier ne fournit pas l’exposé nécessaire des questions « importantes par rapport à la décision de l’organisme … de façon que le "cheminement de l’organisme puisse être raisonnablement discerné" par un tribunal de révision ». SAA, à la page 892. Cet exposé étant absent dans la décision définitive de l’ITC, il a pris la forme du raisonnement post hoc et de l’argumentation proposés par l’avocat de l’ITC et les avocats des parties intéressées nationales devant le groupe spécial.

Le groupe spécial est d’avis qu’il appartient à la Commission de se prononcer sur les arguments importants d’Ivaco et qu’elle doit le faire ouvertement. Autrement, le groupe spécial n’est pas en mesure d’évaluer le bien-fondé des vues des parties et de faire de constatation de fait. Aussi renvoie-t-il l’affaire à l’ITC en lui donnant la directive de traiter de tous les arguments d’Ivaco visant à renverser la présomption légale portant que le changement de volumes des importations en cause était lié à l’existence de l’enquête.

C. Le rejet par la Commission des renseignements relatifs à la rentabilité accrue de deux requérantes dans le deuxième trimestre de 2002.

Au soutien de sa position que la Commission aurait dû étendre son enquête aux données du deuxième trimestre de 2002, Ivaco prétend que la Commission a rejeté à tort des documents qu’Ivaco avait déposés le 24 septembre 2002, au motif qu’ils avaient été déposés hors délai. Ces documents consistaient en une lettre à laquelle étaient joints des rapports déposés auprès de la SEC établissant que deux des requérantes (Keystone et Co-Steel) avaient connu une augmentation de leurs bénéfices au cours du deuxième trimestre de 2002. En revanche, la Commission a accepté une autre communication déposée par Ivaco le 25 septembre 2002, contenant des reportages des médias sur la fusion de l’une des requérantes avec une défenderesse du Brésil et sur l’annonce par trois des requérantes d’investissements dans du nouveau matériel. Par rapport au calendrier de l’affaire, le dépôt des renseignements en cause est intervenu quelque vingt jours après le délai fixé pour le dépôt des mémoires postérieurs à l’audience (le 4 septembre), un jour avant la communication aux parties des rapports définitifs du personnel (le 25 septembre) et trois jours avant le délai fixé pour les dernières observations (le 27 septembre).

Dans sa lettre du 27 septembre 200237, informant Ivaco qu’elle rejetait les renseignements déposés le 24 septembre, la Commission n’a pas indiqué d’autre motif que le fait que le dépôt était intervenu « hors délai ». La seule autre mention de cette question se trouve à la page 3, note 2, de la décision définitive. La Commission y renvoie à l’article 207.68(b) des Règles de la Commission, disposant que les dernières observations des parties « contenant de nouveaux renseignements factuels ne seront pas prises en compte ». 19 C.F.R. § 207.68(b). La Commission renvoie aussi à l’article 19 U.S.C. § 1677m(g), qui, dans la dernière phrase, contient une instruction dans le même sens. À la suite de ce renvoi, la Commission indique simplement que, le 27 septembre 2002, elle a rejeté, au motif du dépôt hors délai, les documents déposés par Ivaco le 24 septembre. On ne peut qu’en déduire que la Commission s’appuyait sur les dispositions législatives auxquelles elle avait renvoyé.

Dans la mesure où les nouveaux renseignements ne faisaient pas partie, de fait, des dernières observations d’Ivaco, mais ont été déposés séparément de ces observations et avant l’expiration du délai fixé pour celles-ci, les dispositions législatives invoquées par la Commission ne peuvent soutenir le rejet des renseignements. Dans leurs mémoires 38 et dans leurs observations orales, toutefois, tant la Commission que la branche de production nationale ont une prétention plus large. Selon leur position, l’économie d’ensemble des Règles établit clairement qu’il n’existe pas de droit de déposer de nouveaux renseignements au-delà du délai établi pour la présentation des mémoires postérieurs à l’audience.

Encore ici, ce n’est pas là l’interprétation nécessaire ou même une interprétation raisonnable des Règles. Le texte complet de l’article 19 U.S.C. § 1677m(g)39 envisage la poursuite de la collecte de renseignements jusqu’à un moment précédant celui où il faut donner aux parties la possibilité de formuler leurs dernières observations. C’est également un argument qui semble miné par la position annoncée par la Commission. En effet, dans son ouvrage Antidumping and Countervailing Duty Handbook, qui explique les Règles (le Manuel), la Commission non seulement permet la présentation de renseignements nouveaux dans le cadre des mémoires postérieurs à l’audience, mais décrit également une procédure selon laquelle des renseignements additionnels peuvent être déposés à la lumière du rapport définitif du personnel. Il est également indiqué, dans le Manuel, que « la Commission clôt le dossier des faits (c’est-àdire cesse d’accepter de nouveaux renseignements sur les faits) environ cinq jours après la publication du rapport du personnel40 ». Cette souplesse à l’égard du dépôt de nouveaux renseignements se manifeste également par l’acceptation, par la Commission, d’autres renseignements déposés par Ivaco le lendemain, soit le 25 septembre, ainsi que par l’introduction dans le dossier de nouveaux renseignements jusqu’au 27 septembre 2002.

L’article 19 U.S.C. § 1677m envisage la fixation de délais pour le dépôt de renseignements. Voir, p. ex., l’article 19 U.S.C. § 1677m(e) à (i). En réalité, ni dans ses Règles ni dans la manière dont elle a mené cette enquête, la Commission ne fixe de délais explicites et fermes pour la présentation de renseignements. L’article 19 U.S.C. § 1677m(f) oblige la Commission à donner « une explication écrite » de son rejet de renseignements seulement « dans la mesure du possible41 », mais lorsque la Commission, comme elle l’a fait ici, donne un motif de rejet de renseignements, ce motif doit avoir un fondement dans la loi. Dans la mesure où il n’est pas évident d’après la législation pertinente ou les Règles que les renseignements déposés par Ivaco le 24 septembre ont été déposés « hors délai » et dans la mesure où ces renseignements ne faisaient pas partie des dernières observations d’Ivaco et donc n’étaient pas clairement « hors délai », on ne trouve pas dans le dossier de justification du rejet des documents déposés le 24 septembre42 .

Parmi les justifications post hoc de ce rejet, la Commission a fait valoir quelques motifs passablement différents de la non-acceptation des renseignements déposés le 24 septembre. Par exemple, on a fait valoir que les renseignements déposés manquaient de pertinence, du fait qu’ils se rapportaient au deuxième trimestre de 200243 et, en deuxième lieu, on a contesté leur utilité, vu qu’ils se rapportaient seulement à deux sociétés, et non à la branche de production natio nale dans son ensemble44 .

Le groupe spécial a déjà décidé qu’il ne peut prendre en considération de telles justifications post hoc et il le peut d’autant moins dans les cas où elles diffèrent des motifs contenus au dossier. En outre, compte tenu du renvoi de la question du refus de la Commission d’étendre l’enquête pour couvrir le deuxième trimestre de 2002, au moins l’une de ces justifications (relative à la pertinence) pourrait en tous les cas être minée par les conclusions de la Commission sur renvoi. Nous renvoyons donc la question du rejet par la Commission des renseignements déposés par Ivaco le 24 septembre 2002.

D. Les autres questions soulevées dans la plainte

1. Le cumul

Ivaco a soulevé la question du cumul dans sa plainte, en alléguant que l’ITC avait à tort cumulé les importations en provenance du Canada avec celles qui provenaient du Brésil, de l’Indonésie, du Mexique, de la Moldavie, de l’Ukraine et de la Trinité-et-Tobago. Cette question n’a pas été traitée dans le mémoire d’Ivaco; la Commission et la branche de production nationale n’ont pas non plus abordé la question dans leurs réponses. En vertu de la règle 58 des Règles de procédure des groupes spéciaux binationaux formés en vertu de l’article 1904 de l’Accord de libre-échange nord-américain (les Règles des groupes spéciaux), les participants qui ne déposent pas de mémoire peuvent se voir débouter par une ordonnance du groupe spécial.

La partie pertinente de la règle 58 est ainsi conçue :

(2) Le groupe spécial peut, de son propre chef …, rendre une ordonnance exigeant la présentation des motifs à l’appui de la révision, si les conditions suivantes sont réunies :

a) aucun mémoire n’est déposé par un plaignant…;

b) aucune requête faite selon la règle 20 n’est pendante.

La règle 2 des Règles des groupes spéciaux dispose : « Un groupe spécial peut, lorsque se pose une question de procédure qui n’est pas visée par les présentes règles, adopter par analogie avec celles-ci la procédure à suivre dans l’affaire dont il est saisi… » Sur le fondement de ces règles, le groupe spécial ordonne à Ivaco de présenter les motifs à l’appui de la révision sur cette question. Si Ivaco ne dépose de communication dans les dix (10) jours suivant la publication de la présente décision par le Secrétariat de l’ALÉNA, la question sera rejetée.

2. Les prétentions concernant le volume, les prix et l’incidence

Ivaco a prétendu dans sa plainte que l’ITC a conclu à tort que (i) le volume des importations et l’augmentation de ce volume, et (ii) le cassage des prix étaient « notables »; que l’ITC a conclu à tort que les importations en cause cumulées « ont eu pour effet d’empêcher de façon notable des hausses de prix »; et que l’ITC a conclu à tort que « les importations en cause ont un effet défavorable notable sur la branche de production nationale ». Ce sont là des questions de fond importantes qui méritent un examen réfléchi et minutieux. Toutefois, compte tenu des questions au sujet des données que la Commission doit étudier sur renvoi, il est prématuré pour le groupe spécial de trancher ces questions jusqu’au dépôt de la décision sur renvoi. 

E. Ordonnance de renvoi

Pour les motifs exposés dans l’analyse ci-dessus, le groupe spécial renvoie cette décision à la Commission pour qu’elle poursuive l’examen de l’affaire dans les conditions suivantes :

1. Le groupe spécial conclut que le défaut par la Commission d’indiquer, dans sa décision, sa position sur la collecte de données du deuxième trimestre de 2002 était arbitraire, capricieux et non conforme à la loi. Le groupe spécial renvoie la question à la Commission pour qu’elle indique la motivation de sa décision de ne pas collecter de données du deuxième trimestre de 2002, comme le demandait la plaignante.

2. Le groupe spécial conclut que le défaut de la Commission de traiter tous les arguments d’Ivaco qui renversent la présomption légale que les changements de volumes des importations en cause, de leurs effets sur les prix et de leur incidence étaient liés à l’existence de l’enquête n’était pas conforme à la loi. Le groupe spécial renvoie la question à la Commission pour qu’elle revoie l’ensemble de la preuve dans le dossier et rende une décision motivée, traitant de tous les arguments et de toutes les questions soulevés par Ivaco.

3. Le groupe spécial renvoie la décision de la Commission de rejeter les renseignements déposés par Ivaco le 24 septembre 2002, pour qu’elle fournisse davantage d’explications.

4. IL EST ORDONNÉ à la Commission de remettre une décision sur renvoi dans les 60 jours suivant le prononcé de la présente ordonnance.

Date du prononcé : le 12 août 2004

Original signé par :

   
  James R. Holbein
  James R. Holbein, président
   
  Serge Anissimoff
  Serge Anissimoff
   
  Kevin C. Kennedy
  Kevin C. Kennedy
   
  David J. Mullan
  David J. Mullan
   
  Robert E. Ruggeri
  Robert E. Ruggeri
   

 


Haute en page

1 Carbon and Certain Alloy Steel Wire Rod from Brazil, Canada, Germany, Indonesia, Mexico, Moldova, Trinidad and Tobago, and Ukraine, 67 Fed. Reg. 66,662 (Int’l. Trade Comm’n. 2002). La position de l’ITC a été publiée dans Carbon and Certain Alloy Steel Wire Rod from Brazil, Canada, Germany, Indonesia, Mexico, Moldova, Trinidad and Tobago, and Ukraine Inv. Nos. 701-TA-417-421 and 731-TA-953, 954, 956-59, 961, and 962 (Final) USITC Pub. 3546 (octobre 2002).

2 Plainte d’Ivaco, p. 5 à 8 (19 décembre 2002)

3 Carbon and Certain Alloy Steel Wire Rod from Brazil, Canada, Egypt, Germany, Indonesia, Mexico, Moldova, South Africa, Trinidad and Tobago, Turkey, Ukraine, and Venezuela, 66 Fed. Reg. 47,036 (2001). Les requérantes étasuniennes étaient Co-Steel Raritan, Inc; GS Industries, Inc.; Keystone Consolidated Industries, Inc. et North Star Steel Texas, Inc.

4 L’ITC a également décidé que les importations en cause en provenance de l’Afrique du Sud, de l’Égypte et du Venezuela étaient négligeables et a clos les enquêtes à leur sujet. 66 Fed. Reg. 54,539 (2001).

5 Le département du Commerce a aussi décidé que les importations en cause en provenance de l’Allemagne et du Brésil étaient subventionnées et que les importations en provenance de l’Allemagne, du Brésil, du Canada, de l’Indonésie, du Mexique, de la Moldavie, de la Trinité -et-Tobago et de l’Ukraine étaient vendues à des prix inférieurs à leur juste valeur.

6 Décision définitive de la Commission, précitée, note 1.

7 Antidumping duty order on wire rod from Canada, 67 Fed. Reg. 65944 (29 oct. 2002); countervailing duty orders on wire rod from Brazil and Canada, 67 Fed. Reg. 65871 (22 oct. 2002); antidumping duty orders on wire rod from Brazil, Indonesia, Mexico, Moldova, Trinidad and Tobago and Ukraine, 67 Fed. Reg. 65945 (29 oct. 2002).

8 L’article 1911 définit ces « principes juridiques généraux » comme, par exemple, « la qualité pour agir, l’application régulière de la loi, les règles d’interprétation des lois, le principe dit mootness et l’épuisement des recours administratifs ».

9 NLRB v. Columbian Enameling & Stamping Co., 306 U.S. 292, à la p. 300 (1939), renvoyant à Consolidated Edison Co. v. NLRB, 305 U.S. 197, à la p. 229 (1938). Voir aussi les arrêts Consolo v. Federal Maritime Commission , 383 U.S. 607, aux p. 619 et 620 (1966); Universal Camera Corp. v. NLRB , 340 U.S. 474, à la p. 477 (1951); Consolidated Edison Co. v. NLRB, 305 U.S. 197, à la p. 229 (1938).

10 Voir, p. ex., les arrêts Matsushita Electric Industrial Co., Ltd. v. United States, 750 F.2d 927, à la p. 933 (Fed. Cir. 1984); Atlantic Sugar, Ltd. v. United States , 744 F.2d 1556, à la p. 1562 (Fed. Cir. 1984).
Le Tribunal de commerce international des États-Unis applique également la même interprétation. Voir, p. ex., les décisions Koyo Seiko Co., Ltd, v. United States, 810 F. Supp. 1287, à la p. 1289 (Ct. Int’l Trade 1993); Tianjin Machinery Import & Export Corp. v. United States, 806 F. Supp. 1008, à la p. 1013 (Ct. Int’l Trade 1992); Tehnoimportexport, UCF America Inc. v. United States, 783 F. Supp. 1401, à la p. 1404 (Ct. Int’l Trade 1992); Minebea Co., Ltd. v. United States, 782 F. Supp. 117, à la p. 119 (Ct. Int’l Trade 1992), confirmée par 984 F.2d 1178 (Fed. Cir. 1993); Armco, Inc. v. United States, 733 F. Supp. 1514, à la p. 1518 (Ct. Int’l Trade 1990).

11 Voir également les décisions Zenith Electronics Corp. v. United States, 812 F. Supp. 228, à la p. 231 (Ct. Int’l Trade 1993); Minebea Co. Ltd . v. United States, 782 F. Supp. à la p. 119 (Ct. Int’l Trade 1992); Torrington Co. v. United States, 745 F. Supp. 718, à la p. 723 (Ct. Int’l Trade 1990), confirmée par 938 F.2d 1276 (Fed. Cir. 1991); American Spring Wire Co. v. United States, 590 F Supp. 1273, à la p. 1276 (Ct. Int’l Trade 1984), confirmée sous l’intitulé Armco, Inc. v. United States , 760 F.2d 249 (Fed. Cir. 1985).

12 L’article 516A(b)(1)(B) du Tariff Act of 1930, modifié, 19 U.S.C. §1516a(b)(1)(B), limite de la même manière l’examen du groupe spécial à l’information versée au dossier pendant la procédure administrative.

13 Le paragraphe 2 de l’article 1904 de l’ALÉNA dispose que la « législation » à prendre en compte comprend « les lois, le contexte législatif, les règlements, la pratique administrative et la jurisprudence pertinents, dans la mesure où un tribunal de la Partie importatrice tiendrait compte de ces facteurs ». Les décisions de la Cour suprême des États-Unis et de la Cour d’appel du circuit fédéral des États-Unis lient le groupe spécial.

14 La Cour d’appel du circuit fédéral a cité au soutien de ce principe les arrêts Chevron. U.S.A,. Inc. v. Natural Resources Defense Council, 467 U.S. 837, à la p. 844 (1984); Udall v. Tallman, 380 U.S. 1, à la p. 16 (1965); K Mart v. Cartier, Inc., 486 U.S. 281, à la p. 291 (1988); United States v. Riverside Bayview Homes, Inc., 474 U.S. 121, à la p. 131 (1985).

15 Le Tribunal de commerce international a souvent appliqué ce principe. Voir, p. ex., les décisions Tianjin Machinery Import & Export Corp. v. United States, 806 F. Supp. 1008, à la p. 1013 (Ct. Int’l Trade 1992); PPG Industries, Inc. v. United States, 712 F. Supp. 195, aux p. 197 et 198 (Ct. Int’l Trade 1989), confirmée par 978 F.2d 1232 (Fed. Cir. 1992); Cabot Corp. v. United States , 694 F. Supp. 949, à la p. 953 (Ct. Int’l Trade 1988).

16 « Comme c’est le département du Commerce qui est chargé d’appliquer les lois commerciales et leur réglementation d’application, il a droit à la déférence à l’égard de ses interprétations raisonnables de ces lois et de cette réglementation. » PPG Industries, Inc. v. United States , 712 F. Supp. à la p. 198 (Ct. Int’l Trade 1989), confirmée par 978 F.2d 1232 (Fed. Cir. 1992).

17 Avant l’adoption du Trade Agreements Act of 1979, le département du Trésor, qui était chargé de l’application de la législation antidumping, possédait également ce pouvoir discrétionnaire. Décision United States v. Zenith Radio Corp., 562 F.2d 1209, à la p. 1216 (C.C.P.A. 1977), confirmée par 437 U.S. 443 (1978).

18 Les autres délais fixés étaient le 12 juin pour le rapport du personnel préalable à l’audience, le 19 juin pour les mémoires préalables à l’audience; l’audience était fixée au 25 juin et les mémoires postérieurs à l’audience devaient être présentés pour le 2 juillet 2002. Les dernières observations devaient être présentées pour le 23 juillet 2002. 67 Fed. Reg. 22105 (2 mai 2002).

19 67 Fed. Reg. 36022, à la p. 36022 (22 mai 2002). L’ITC avait déjà fixé son calendrier en fonction de la première décision définitive de l’ITA dans ses enquêtes. L’ITA a ensuite aligné ses décisions sur les droits compensateurs avec ses décisions sur les droits antidumping et a reporté par la suite les dates de ses décisions de dumping définitives.

20 Id.

21 Lettre de Christopher Stokes au secrétaire Abbott (19 juin 2002).

22 Lettre de William Silverman au secrétaire Abbott (1er août 2002).

23 Mémoire postérieur à l’audience d’Ivaco, à la p. 8 (5 septembre 2002).

24 Lettre de William Silverman au secrétaire Abbott (23 septembre 2002).

25 Dernières observations d’Ivaco à la p. 3 (30 septembre 2002).

26 La loi dispose : « La Commission doit rendre une décision définitive au sujet de la question de savoir si une branche de production des États-Unis subit un dommage important ou est menacée d’un dommage important, ou si la création d’une branche de production aux États-Unis subit un retard important du fait des importations ou des ventes (réelles ou probables) à des fins d’importation de la marchandise à l’égard de laquelle l’autorité compétente a rendu une décision positive en vertu du paragraphe (a)(1) du présent article. »

27 Kenda Rubber Industrial Co., Ltd. v. United States, 630 F. Supp. 354, à la p. 359 (Ct. Int’l Trade 1986) (« Les demanderesses plaident que la loi oblige la Commission à examiner la période actuelle parce que le texte est rédigé au présent. Bien que l’article en cause soit rédigé au présent, le Tribunal n’estime pas que cet argument est irréfutable. ») Comparer avec l’arrêt Chapparal Steel Co. v. United States, 901 F.2d 1097, à la p. 1104 (Fed. Cir. 1990), où la Cour d’appel a fait observer de façon générale que « la nécessité du dommage oblige à décider si une branche de production subit un dommage important actuel ». La Cour se fondait, en partie, sur le fait que « [l]a loi est entièrement rédigée au présent ». Toutefois, la question qui se posait dans l’affaire Chapparal, une affaire de cumul, était de savoir si l’ITC avait agi de façon raisonnable en excluant du cumul certaines importations en se fondant sur leur situation « au jour du vote ». Id. à la p. 1105. Le Tribunal n’était pas saisi de la question de savoir s’il fallait prolonger la période d’enquête ou ajouter des données au dossier.

28  Voir également les décisions British Steel Corp. v. United States, 8 CIT 86, F. Supp. 405, à la p. 411 (1984); Steel Authority of India, Ltd. v. United States., 146 F. Supp. 2d 900, à la p. 906 (2001) (« Le Tribunal a uniformément jugé que la Commission jouissait d’un vaste pouvoir discrétionnaire pour choisir la tranche de temps couverte par son enquête et son analyse. »); Kenda Rubber Industrial Co. v. United States, 10 CIT 120, aux p. 126 et 127, 630 F. Supp. 354, à la p. 359 (1986).

29 Chr. Bjelland Seafoods A/C v. United States, 16 CIT 945, p. 954 (1992).

30 La Cour d’appel du circuit fédéral a dit : « [Q]uant à la possibilité pour la Commission, sur renvoi, de rouvrir le dossier de preuve, la Commission en a manifestement le pouvoir, mais il n’appartient qu’à elle de décider de l’exercer. » Nippon Steel Corp. v. International Trade Commission, 345 F.3d 1379, à la p. 1382 (Fed. Cir. 2003).

31 Mémoire de la Commission, à la p. 28.

32 Mémoire de l’organisme d’enquête, p.32 et 33 (30 mai 2003).

33 Nous ne traitons pas du fait que le « changement des données » doit être « notable ». La Commission n’a pas indiqué expressément dans sa décision définitive que le changement de volume des importations en cause était notable.

34 Mémoire d’Ivaco, à la p. 29.

35 Les parties ne sont pas du même avis au sujet de la cause de l’amélioration de la branche de production nationale.

36 On ne trouve pas d’analyse ou d’exposé traitant expressément des arguments présentés par Ivaco pour renverser la présomption que les importations en cause ont diminué par suite de l’enquête en cours.

37 Lettre à WH datée du 27/9/02 rejetant des rapports trimestriels déposés en dehors des délais prescrits, DL 184 (Public Record Online 200209270062).

38 Voir le Mémoire des parties intéressées de la branche de production nationale en réponse au mémoire des plaignantes, aux p. 30 à 32 (Mémoire de la branche de production nationale); Mémoire de l’autorité chargée de l’enquête, l’International Trade Commission des États-Unis, aux p. 38 à 40 (Mémoire de la Commission).

39  Voici le texte complet de ce paragraphe :

Les renseignements qui sont présentés dans les délais prescrits à l’autorité compétente ou à la Commission pendant qu’une procédure ouverte en vertu du présent sous-titre est en cours pourront faire l’objet d’observations des autres parties à la procédure dans le délai raisonnable fixé par l’autorité compétente ou la Commission. L’autorité compétente et la Commission, avant de rendre une décision définitive en vertu de l’article 1671d, 1673d, 1675 ou 1675b du présent titre, doivent cesser de collecter des renseignements et fournir aux parties une dernière possibilité de présenter des observations sur les renseignements obtenus par l’autorité compétente ou la Commission (selon le cas) sur lesquels les parties n’ont pas eu auparavant la possibilité de formuler des observations. Les observations contenant de nouveaux renseignements factuels ne seront pas prises en compte.

40 U.S. Int’l Trade Comm’n, Antidumping and Countervailing Duty Handbook, aux pages II-21 et 22.

41 Cet alinéa, dans sa version complète, dispose :

Si l’autorité compétente ou la Commission refuse d’accepter dans le dossier des renseignements présentés dans une enquête ou un examen tenu en vertu du présent sous-titre, elle doit, dans la mesure du possible, fournir à la personne présentant les renseignements une explication écrite des motifs de non-acceptation des renseignements.

42 La seule décision pertinente sur cette question que les parties ont invoquée est Chefline Corp. v. United States, 219 F. Supp. 2d 1303, 1307-09 (Ct. Int’l Trade 2002). Le Tribunal y a confirmé le rejet par la Commission d’observations en réponse au motif qu’elles étaient hors délai. Le rejet se fondait sur le fait que les observations avaient été déposées après l’expiration du délai et contenaient des renseignements nouveaux. Cela n’a guère de rapport avec la présente affaire, où il n’est question ni de dernières observations pour lesquelles un délai avait été fixé, ni de renseignements faisant partie de dernières observations. Le seul élément de cette décision qui pourrait peut-être être pertinent se trouve à la note 5, où le Tribunal, en renvoyant à l’article 19 U.S.C. § 1677m(g), dit que la Commission a le « pouvoir discrétionnaire de fixer un calendrier raisonnable pour la collecte de l’information ». Cela peut donner à penser que, dans le cas où aucun délai précis n’est spécifié, la Commission a un pouvoir discrétionnaire concernant le moment auquel les renseignements nouveaux doivent être présentés. Toutefois, elle ne doit pas exercer ce pouvoir discrétionnaire de façon arbitraire.

43 Voir le Mémoire de la branche de production nationale, à la p. 32.

44 Voir le Mémoire de la Commission, à la p. 40; Mémoire de la branche de production nationale, à la p. 40.


Source: Secrétariat de l'ALÉNA